Damien MATHON, UFLC
Le Président de la République s’est rendu à la 18ème édition des assises de l’économie de la mer le mardi 28 novembre dernier. Cette manifestation, qui se tenait cette année à Nantes, lui a permis de rappeler les ambitions de la France en matière de développement des énergies marines renouvelables en général et d’éolien maritime en particulier.
Il a même profité de l’occasion pour renforcer des objectifs déjà solidement ancrés depuis le discours de Belfort en février 2022. Cette filière énergétique est l’une des pierres fondatrices d’une stratégie climatique « sans regret ». A l’image du célèbre pari de Blaise Pascal, il semble fort peu raisonnable de ne pas croire dans le potentiel de cette filière. Voici pourquoi !
Les atouts énergétiques :
- L’éolien en mer jouit de deux atouts énergétiques intrinsèques : la puissance installée des turbines peut être très importante, car l’environnement s’y prête, et le facteur de charge (autrement dit la durée de fonctionnement annuelle de la machine à pleine puissance) frise les 50%. On peut donc compter sur des kWh renouvelables nombreux et régulièrement distribués durant l’année ;
- On le rappelle assez peu mais l’éolien en mer s’installera naturellement près de lieux de consommation qui ont vocation à se développer. La façade Ouest de la France attirant de plus en plus de retraités qui viennent chercher l’ensoleillement et la douceur climatique de ces régions. La proximité des lieux de production et de consommation fait partie des optimums d’un système électrique ;
- Dans le cas spécifique de la Bretagne, rappelons que l’éolien en mer est une opportunité énergétique indispensable à la sécurité d’approvisionnement de la région ;
- Enfin, en 2050 et alors que la consommation d’électricité sera supérieure à celle d’aujourd’hui du fait de l’électrification massive des usages pour sortir des fossiles, l’éolien maritime pourrait couvrir 34% de notre consommation d’électricité ce qui fera de cette source d’énergie l’une des principales du mix électrique.
Les atouts industriels :
- On l’oublie peut-être un peu vite mais 4 usines européennes sur un total de 12 sont installées en France ! General Electric, LM Wind et SIEMENS GAMESA se sont installé dans notre pays dans la foulée du lancement de la filière il y a dix ans ;
- A côté des fabricants précédemment cités, plusieurs dizaines de PMI et ETI françaises sont actives dans la fabrication des sous-stations, des câbles, des fondations ou des mats ;
- Et tout ceci sans évoquer plus en détail le rôle confié aux entreprises spécialisées dans le service maritime et la maintenance de proximité ;
- Ce sont donc 20 000 emplois directs et indirects pour l’essentiel dans l’industrie que l’on attend d’ici 2035[1].
Les atouts environnementaux :
- Avec 15 grammes de CO2 émis par kWh, l’éolien maritime est une énergie renouvelable performante du point de vue de l’analyse carbone tout au long du cycle de vie ;
- L’éolien maritime est également questionné sur son impact potentiel en matière de biodiversité marine. La phase de construction peut nuire aux mammifères marins éloignés par le bruit. Mais cette phase est temporaire et l’impact réversible selon des études scientifiques internationales qui l’ont démontré. Une fois le parc construit, on peut constater un effet « réserve » en termes de biodiversité marine. La phase d’exploitation peut impacter, quant à elle, les oiseaux mais les hauteurs plus importantes des nacelles, liées à la puissance unitaire en croissance des machines, donne des gages d’amélioration sensible sur le sujet.
- Quant à l’aspect paysager, si 50% des Français s’interrogent sur le risque de réduction du tourisme, ces mêmes Français sont 68% à penser que l’éolien maritime est un levier important pour permettre à la France d’atteindre ses objectifs en matière d’énergies renouvelables. Et 74% des Français qui vont au moins une fois par mois à la mer considèrent que les pâles ne posent pas un problème majeur d’esthétique[2]. D’ailleurs les deux premiers parcs mis en service deviennent une attraction pour un tourisme d’un nouveau genre[3].
La France, avec 7500 km de linéaire côtier, dispose d’un gisement unique en Europe pour bénéficier d’une énergie renouvelable indispensable à sa transition énergétique. Le Président de la République, à Nantes, a souhaité que les prochains projets puissent être développés en 5 à 6 années contre 10 à 12 jusqu’à présent. C’est d’abord un impératif énergétique car le « mur énergétique dès 2030 »[4] se rapproche dangereusement. C’est ensuite une exigence industrielle pour que nos usines ne subissent pas un « trou d’air » en matière de commandes dans un monde où les fabricants venus des Etats-Unis ou de Chine se renforcent grâce à leurs marchés domestiques gigantesques.
[1] 2022.03.14_pacte-eolien-mer.pdf (ecologie.gouv.fr)
[2] https://www.tf1info.fr/environnement-ecologie/sondage-exclusif-tf1-eoliennes-peche-protection-du-littoral-les-inquietudes-des-francais-pour-la-mer-2276869.html
[3] Eoliennes de la Baie de Saint-Brieuc. Des visites touristiques organisées en mer (francetvinfo.fr)
[4] Agnès Pannier-Runacher: «Un mur énergétique nous attend dès 2030» (lefigaro.fr)